À 32 ans, Charlène Saintonge vient de produire sa toute première cuvée. Après une carrière à commercialiser le vin des autres, elle sort son millésime qu’elle a élaboré toute seule à Angers.
C’est l’histoire d’un stage qui a tout changé. Inscrite en licence Langues étrangères appliquées (LEA) anglais-espagnol à l’Université d’Angers, Charlène Saintonge effectue en 2e année un stage de trois mois comme guide bilingue dans une cave à Saumur. L’occasion de mettre un premier pied dans le domaine du vin. « Ça m’a beaucoup plu, il y a une notion de partage qui amène de la convivialité et j’ai réalisé que je pouvais voyager à travers le vin », se souvient-elle. Elle passe sa dernière année de licence à Oxford (Angleterre) en 2014 puis poursuit avec une licence professionnelle à l’École supérieure des agricultures (ESA) et un master Commerce international du vin à l’Université d’Avignon.
Après avoir travaillé neuf mois à Bangkok (Thaïlande) pour le Comptoir Français du vin, elle est recrutée en 2018 comme commerciale chez un gros négociant basé à Bordeaux. Pourtant, malgré sa passion, Charlène ne s’y retrouve pas. « Je vendais des vins aux États-Unis sans connaître les producteurs, avec énormément de pression. »
Elle y reste trois ans avant de revenir en Anjou, à Chaudefonds-sur-Layon, au sein d’un domaine familial de 28 hectares. Autre salle, autre ambiance puisque la jeune femme donne un coup de main pour la vinification puis s’assure de la vente. Plus le temps passe, plus elle a des envies d’ailleurs. « Je voulais quitter le bureau pour être dans les vignes. J’aime le côté petite structure et prendre part à la production jusqu’à la vente. »
Une démarche écologique et responsable
Le domaine est ensuite vendu et Charlène hésite à s’installer à son compte. Elle trouvera son salut grâce aux réseaux sociaux. « Je suivais les aventures d’une fille, Pauline Lair, qui avait créé un chai urbain à Angers. Elle recherchait quelqu’un pour la vinification et de fil en aiguille, elle m’a prêté du matériel pour que je produise mon propre vin chez elle. »
Charlène s’approvisionne en raisins chez des viticulteurs bio basés à Chaudefonds-sur-Layon et Saint-Aubin-de-Luigné. Malgré un été 2024 pluvieux et un mois de septembre peu ensoleillé, la vinification – « naturelle, c’est-à-dire sans utiliser d’intrants » — se passe bien et elle vend ses premières bouteilles en mai 2025. « C’est un vin blanc sec, 100 % chenin, décrit-elle. Il est vif, tranchant, avec un peu de matière pour un bel équilibre. Parfait en apéritif pour accompagner des fruits de mer. Il y a une démarche écologique et responsable qui me tient à cœur afin de protéger le consommateur et moi-même. À mon goût, les meilleurs vins sont faits avec des raisins bio. »
Elle écoule ses 1 700 bouteilles de sa cuvée – baptisée « Sans chichi » — principalement à Angers et Nantes, chez des restaurants et des cavistes. Alors, est-ce plus facile de vendre son propre vin ? « Cela a une saveur particulière, il y a plus de doutes et de peur. J’ai vécu un moment de solitude pendant la vinification mais c’était mieux au moment de le faire déguster. Les émotions sont décuplées, car on y met forcément du sien, c’est comme une mise à nu. »